Comment exister sans la parole ?

Aujourd’hui plus que jamais, dans une société où la communication n’est plus véritablement un simple outil d’expression mais bien un véritable art de vivre et de pouvoir, il est effarant de constater que les nantis se sont accaparé le droit à la parole des plus démunis afin d’exercer encore davantage leur mainmise sur ceux-ci. Les grands peuvent tout dire alors que les petits doivent se taire : il n’est plus question de laisser tout un chacun s’exprimer librement mais bien de laisser la parole à ceux qui veulent asseoir leur domination et leur statut social privilégié. Petit à petit, un clivage discriminatoire s’est mis en place où les personnes défavorisées voient, lentement mais sûrement, disparaître un à un leurs droits fondamentaux.

Ainsi, il est devenu courant de ne plus écouter les gens démunis ; on préfère les abandonner à leur sort, sans vouloir leur tendre la main ou simplement leur prêter une oreille attentive. En leur enlevant tout moyen de communication, on leur ôte par la même occasion leur statut d’être humain. Quelle sera la prochaine étape ? Broyer l’esprit et la pensée des individus défavorisés pour les transformer en ombres de chair sans âme ni identité ?

Pourtant, il est paradoxal d’entendre les nantis dirent qu’il faut aider les plus défavorisés si, dans le même temps, ils ne font rien pour eux alors qu’ils en ont les moyens financiers et statutaires : les magnifiques paroles sont enterrées aussi rapidement que les belles promesses s’envolent dans les airs !

Ne laissons pas les défavorisés être exclus de la société. Tout le monde a le droit d’exister et cela passe inévitablement par le droit de communiquer en s’exprimant librement. Le respect de l’individu passe par le respect de ses droits fondamentaux. Le priver de la parole revient à l’emprisonner, à ne plus le considérer comme un être humain à part entière. Des gens ont bien compris cette situation mais malheureusement, sans argent, personne ne veut les écouter et les comprendre. Heureusement, d’autres, plus aisés financièrement, n’ont pas oublié que l’argent ne fait pas le bonheur et qu’une vie épanouie et fleurissante se construit dans la solidarité et le respect d’autrui. Avec eux, les actes concrets prennent le pas sur les discours faciles et sans fin.


« La pire des prisons : ne pas pouvoir s’exprimer. »

Claude Jasmin, L’armoire de Pantagruel, 1981

 





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